IO SONO L’AMORE (2010)

Le film est sous de bonnes et d’évidentes influences sans qu’on puisse lui refuser sa beauté propre. Les cinéphiles reconnaîtront aisément des chemins déjà empruntés par les plus grands. Parfois, l’admiration étouffe l’œuvre qui bascule dans l’imitation voire la servilité. Luca Guadagnino,lui, réussit une synthèse qui, le plus souvent, donne au film son originalité. Et si vous allez le voir sans être alourdi d’un bagage de références parfois bien encombrant, le plaisir est pour vous, celui que donnent le raffinement du cadrage, la sensualité de la lumière qui glisse sur les objets et met en harmonie la nature et les corps amoureux. La bande-son, les changements parfois abrupts des styles musicaux se substituent aux mots encore inconnus des personnages, pour trahir des passions violentes qui éclatent en eux, malgré eux, sans avoir eu le temps de germer. La description de la riche société industrielle milanaise joue sur les contrastes : l’élégance d’un décor, écrin magnifique de valeurs patriarcales censées se perpétuer par des codes transmis de génération en génération, mariée pour le pire, au rejet de la différence, qu’elle soit sociale ou sentimentale. Ainsi faut-il refouler son homosexualité ou aller la vivre secrètement, loin de la famille. La famille Recchi connaîtra deuil et bouleversement, mais elle refera sa façade de respectabilité en excluant la maudite, la scandaleuse Emma. Emma…..magnifique portrait de femme, superbe Tilda Swinton. Bourgeoise élégante et soumise aux codes de sa classe, puis amoureuse sans compromis ni condition, mère aimante et mère brisée, son corps et son visage se métamorphosent pour ne plus être que la passion têtue qui la pousse vers un autre monde, elle franchit le miroir, elle existera jusqu’au bout d’elle-même.