LES MAINS EN L'AIR

2067 : une femme se souvient d’un passé déjà lointain où, dans une grande ville de l’Europe des Libertés et des Droits de l’Homme, on menaçait d’expulser ceux qu’on appelait alors des «sans papier». Cela se passait en 2009, Milana ne se souvient plus qui était Président en cette année-là ! Réalisateur engagé, Romain Goupil nous suggère par cet artifice que ce qui devrait nous révolter aujourd’hui apparaîtra après-demain comme un scandale à l’existence incompréhensible. Il construit son film sur un large retour en arrière, lorsque des enfants, à l’insu de leurs parents, s’unissent pour protéger leur copine tchétchène sur le point d’être expulsée. Ce sont eux qui prennent le pouvoir, avec leurs codes, plus ou moins inspirés du monde des adultes, leur générosité spontanée, leur imaginaire qui leur permet de créer un monde avec leurs mots, leurs personnages, leurs rires et leurs peurs. Le réalisateur s’efforce de ne pas transformer les enfants de la bande en adultes en réduction, respectant la spontanéité de leur révolte. Valeria Bruni-Tedeschi (belle-sœur du Président dont Milana a oublié le nom) est une mère fragile et généreuse, elle agit sans se payer de mots ni de bonnes intentions. Les autres adultes sont moins crédibles, comme inventés pour exprimer la multiplicité des points de vue sur un sujet qui passionne et divise même les esprits éclairés. C’est lorsque les adultes apparaissent que le film perd de sa spontanéité. D’autant qu’il semble hésiter entre le conte (la fugue et le refuge des enfants) et le réalisme d’un fait-divers filmé dans sa banalité télévisuelle (journalistes en quête de sensationnel, parents affolés). Contraste sans doute volontaire mais qui déséquilibre le film ,dont on saluera néanmoins la générosité du propos et l’enthousiasme de sa réalisation.