Recherche       




DEJA S'ENVOLE LA FLEUR MAIGRE (2016) - Cinemaniacs.be
DEJA S'ENVOLE LA FLEUR MAIGRE


En juin 1946, l’Italie et la Belgique signent des accords de coopération et d’immigration. C’est le début d’un arrivage de familles italiennes dans les régions minières du pays. Août 1956, la catastrophe de Marcinelle met fin à ces accords, mais les migrants continuent d’affluer à la recherche de travail. Face à cet afflux d’immigrés, le Ministère de l’instruction publique commande un film à Paul Meyer consacré aux familles d’immigrés dans le Borinage. Avec son équipe, en particulier ses deux opérateurs Freddy Rents et André Gœffers le réalisateur se met au travail. Mais, une fois sur place Paul Meyer se rend compte de la réalité du terrain. Mêlant approche documentaire et fictive, Meyer filme avec poésie la mélancolie, la misère, les joies, la vie des familles de mineurs dans le Borinage. Il narre deux histoires en parallèle, celle de l’arrivée d’une famille sicilienne, le premier jour des enfants à l’école, les dimanches festifs, les jeux sur les terrils... Pendant ce temps, une autre histoire fait écho : celle de Domenico, mineur depuis 17 ans, lui, veut rentrer au pays car le travail commence déjà à se faire rare.



Etrange destinée que ce film du réalisateur belge Paul Meyer. Au départ, ce fut une commande du Ministère de l’Instruction publique de l’époque(1960) pour montrer la bonne adaptation des migrants arrivés au Borinage pour y travailler dans les mines. Une œuvre de propagande, tournée avec des comédiens amateurs, en français et en italien. Paul Meyer ne s’est pas tenu aux impératifs de la propagande, et son travail fut désavoué par le gouvernement belge, qui exigea même le remboursement des avances consenties. Pourtant salué en Italie par les grands cinéastes du néo-réalisme, le film ne réapparut que 30 ans plus tard, sans beaucoup de retentissement, et le revoici aujourd’hui dans une version restaurée à l’heureuse initiative de la Cinematek. On s’aperçoit très vite qu’il s’agit bien plus qu’un documentaire. L’histoire est simple : elle raconte les premiers jours d’une famille arrivée d’Italie qui correspond avec le départ d’un ouvrier, fatigué, usé, qui a décidé de faire le chemin inverse. Pas de misérabilisme, les images ont l’éloquence de leur choix qui introduit même une certaine distance entre le regard et la réalité, ce qui crée une ambiance teintée d’une poésie mélancolique : les paysages, l’environnement quotidien, les murs en voie de délabrement, couverts d’affiches à moitié déchirées, comme si la solidarité sociale à laquelle elles appellent était en train de disparaître ,tout a une force symbolique. Les terrils fument, le vent soulève les poussières, les jeux des enfants ont quelque chose de triste et de dérisoire ; l’école, le curé ne semblent guère disposés à remplir une fonction d’émancipation. Les fêtes (on chante, on danse) dissimulent difficilement une tristesse profonde, celle que donne la quasi-certitude d’un avenir tout en grisaille : « charbonnage, chômage, Borinage » se répète sans cesse l’ouvrier sur le départ, avec un regard attristé vers les nouveaux arrivés : plus d’espoir, plus de rêve. On comprend que le Gouvernement belge n’ait pas apprécié ! Paul Meyer n’aura jamais la possibilité de réaliser un second long métrage ! Comment regarder ce film aujourd’hui ? Il y a eu le grand film d’Henri Storck et de Joris Ivens, Misère au Borinage. Celui de Meyer a choisi un autre chemin, moins réaliste, plus poétique : les 2 ont une certaine complémentarité, l’exploitation de la misère humaine y est montrée, dénoncée, chacun à sa manière : on aurait tort de croire qu’il s’agit d’un temps complétement révolu.

Jean-Pierre Sculier








2016
Belgique
Documentaire
1h23


Realisateur

Paul
Meyer




Acteur

Dominico
Mescolini

(Domenico, un mineur qui décide de rentrer en Itali)


Valentino
Gentili

(Valentino, un enfant)


Luigi
Favotto

(Luigi, un fils de Pietro)


Scenariste

Paul Meyer

Producteur

Paul Meyer

Maurice Taszman

Compositeur

Arsène Souffriau

Date de Sortie

Belgique
01/06/2016

Distributeur

Cinémathèque royale